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mercredi 3 mai 2017

Sous la pluie

Je ne sais pas d'où venaient ces larmes.

Étaient-elles teintées de peine, de joie ? Empreintes de solitude, d'appréhension, de fierté ? Avaient-elles quelque chose à voir avec moi, avec cet autre, avec ces autres, avaient-elles quelque chose à voir avec ce qu'il se passe autour, l'angoisse de l'attente, l'incertitude de demain, le pays sur la brèche, la bascule inévitable, avaient-elles quelque chose d'intime, avaient-elles quelque chose de plus grand ?

Je n'ai pas reconnu leur goût, était-ce la peur, était-ce le doute, était-ce le manque ? Était-ce la conviction, venue d'un ailleurs inconnu, que malgré tout, tout irait bien ? Était-ce la crainte que plus rien ne serait jamais pareil, que je ne pouvais plus prédire l'année prochaine, le mois prochain, la semaine prochaine, demain ?

Je n'ai pas réussi à estimer leur impact sur ma peau, étaient-elles lourdes de chagrin, de désespoir, de mélancolie, charriaient-elles le poids d'un malheur si imprévisible il y a quelques semaines, alors qu'après tout hier encore, j'avais 20 ans ? Étaient-elles légères, infimes, transportant uniquement la sérénité, le bien-être, la douceur de la nostalgie ?

Je ne sais pas d'où venaient ces larmes, ce qu'elles voulaient me dire, ce qu'elles voulaient dire de moi, mais là, ce matin, mêlées de pluie et d'un flot continu de mille et uns sentiments tous aussi forts les uns que les autres, elles étaient la seule chose qui avait à exister, quand enfin elles sont arrivées.

© Isa – 3 mai 2017